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QUESTION D'ACTU

Mélangés à l’alimentation

Seniors : les médicaments écrasés donnent mauvais goût à la nourriture

Certaines personnes âgées ont du mal à déglutir. Les soignants écrasent donc leurs comprimés et les mélangent à leurs aliments. Le goût qui en ressort est détestable, d’après un test.

Seniors : les médicaments écrasés donnent mauvais goût à la nourriture JAUBERT/SIPA




On ne peut pas s’en passer, mais ils ont parfois très mauvais goût. Ecraser les médicaments est une pratique courante dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) : 32 % des patients sont concernés. Mais jusqu’ici, aucune étude ne s’est intéressée à l’impact de ce mode d’administration du médicament sur le goût des aliments. C’est désormais chose faite, grâce au CHU de Nice (Alpes-Maritimes) et à la chaîne d’EHPAD Korian, qui présentent les résultats de l’étude MELA.

Le paracétamol dégoûte les goûteurs

Les personnes âgées doivent souvent prendre de nombreux médicaments. En moyenne, ils en consomment 6 à 8 par jour... Le tout réparti sur 6 à 20 prises. Dans ces conditions, et en tenant compte des difficultés à déglutir, les soignants adoptent parfois les grands moyens : écraser les médicaments pour une administration plus simple.

L’écrasement des médicaments, « c’est un problème qui est connu », selon le Pr Isabelle Prêcheur, chirurgien dentiste au CHU de Nice. Mais aucune étude n’a été menée sur le sujet. Aucune plainte n’a été émise non plus, principalement parce que les personnes âgées dépendantes « ne communiquent plus ou mal. Il n’y aura pas de plainte spontanée, et si on leur pose la question, elles ne répondront pas forcément », explique cette praticienne qui a lancé l’étude MELA.

16 volontaires sains ont été recrutés. 8 étaient des soignants, 8 des représentants de la société civile. Un chef étoilé Michelin a même accepté de se prêter au jeu. Tous ont goûté des mélanges entre les 10 médicaments les plus prescrits, un « mix » de 6 médicaments, un contrôle, et de la compote ou de l’eau gélifiée.

 

Au total, 24 verrines ont été « testées » par ces experts d’un jour, qui ont ensuite attribué une note de 0 à 10. « Ils sont tombés des nues en se rendant compte de l’ampleur du problème », témoigne Isabelle Prêcheur. Les pires notes ont été attribuées à l’hypnotique zopiclone, à l’antiagrégant plaquettaire clopidogrel et au paracétamol.

« Un facteur d’anorexie »

Le mélange de six médicaments s’avère particulièrement exécrable pour les goûteurs. Et même si les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS, voir encadré) n’incitent pas à se livrer à ces mélanges, c’est un acte assez fréquent. « En pratique, les aides-soignants n’ont pas les moyens de faire autrement et on ne peut pas leur en vouloir », déplore le Pr Prêcheur.

Les recommandations de la HAS

En 2010, la Haute Autorité de Santé (HAS) a émis des recommandations encadrant l’écrasement des médicaments. Une liste a été établie. L’Autorité préconise de limiter au maximum le recours à cette méthode, de chercher des alternatives, de préciser le motif de l’écrasement sur la prescription et de contacter la pharmacie en cas de besoin. Les experts conseillent aussi d’utiliser un « véhicule » neutre, tel que de l’eau épaissie.

 

Le mauvais goût des médicaments écrasés a plusieurs conséquences sur la santé des personnes âgées. Entre le goût amer et les effets secondaires, « la personne ne termine pas son aliment. Il y a donc une mauvaise observance et une perte d’appétit, détaille Isabelle Prêcheur. C’est un vrai problème et un facteur d’anorexie. »

L’aventure s’est montrée utile à plusieurs titres. Les chefs cuisiniers ont donné des astuce au personnel des EHPAD : mieux vaut mélanger les médicaments à de la confiture, au goût plus sucré. Après la consommation, la mie de pain blanc permet de faire passer le goût amer des médicaments.

Les soignants doivent aussi prêter attention aux signes corporels qu’expriment les patients. La différence entre les troubles de la déglutition et de la mastication sont aussi à établir. Cela permettrait d’éviter 10 à 15 % de médicaments écrasés. « Pour mastiquer, il faut des dents et des muscles de la langue et des joues. Pour déglutir, il faut des muscles au niveau du pharynx, explique le Pr Prêcheur.
L’étude a montré que, quand une personne a de mauvaises dents, on lui donne une alimentation mixée ou hachée. 10 à 15 % d’entre elles ont de mauvaises dents, mais elles déglutissent correctement ! » Changer les formes galéniques est aussi une piste d’avenir.

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