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A Marseille

Santé : la culture patient de l'Institut Paoli-Calmettes

Santé : la culture patient de l'Institut Paoli-Calmettes L'Institut Paoli-Calmettes à Marseille, capture d'écran Twitter




ENQUÊTE – L’instauration du tiers payant généralisé dans la loi est un pas de plus vers la démocratie sanitaire. Mais au quotidien, les usagers ont du mal à peser sur les décisions des politiques. A Marseille, l'Institut Paoli-Calmettes a su montrer un autre visage de l'hôpital.


La démocratie sanitaire passe aussi par les représentants des patients à l'hôpital (voir encadré plus bas). Mais quinze ans après la loi Kouchner, le bilan reste mitigé. « Dans les hôpitaux, la représentation des usagers est très variable en fonction des établissements et des régions », confie Didier Tabuteau, responsable de la « Chaire Santé » à Sciences Po Paris. 

Au sein des conseils de surveillance ou des commissions des usagers des hôpitaux, les patients servent parfois de faire valoir ou d’alibi, alors que certains établissements jouent le jeu.

C'est le cas de l’Institut Paoli-Calmettes (IPC) de Marseille, un établissement en pointe dans la démocratie sanitaire. « Dans ce centre régional de Lutte Contre le Cancer (CRLCC), les patients ont vraiment leur mot à dire dans la recherche clinique et la gouvernance des projets d’établissement », indique Jean-Louis Vidalenc, qui fait partie du comité de patients de l’IPC depuis longtemps.

 

Une montée en puissance progressive

Créé en 1998, cette instance a une présence active depuis les années 2000 au sein de l'IPC. « A cette époque, le directeur de l’hôpital, Dominique Maraninchi (1), s’est aperçu qu’il y avait un problème avec la représentation des usagers qu'il jugeait "insuffisante" malgré leur présence dans le comité de direction de l’établissement », raconte Jean-Louis Vidalenc.

« Je crois que le problème est que ces gens n’étaient pas des malades. Ils n’avaient donc pas une connaissance directe de ce qui se passe à l’hôpital pour une personne atteinte d'un cancer. On vivait cette situation comme une confiscation de la parole des patients », ajoute-t-il.

Le RU (Représentant des Usagers)

La Loi Kouchner du 4 mars 2002 : Elle incite les établissements de santé à ouvrir leurs portes aux usagers et leur reconnaître des droits individuels (accès à leur dossier, confidentialité, respect de la dignité) et des droits collectifs (une place et un rôle sont reconnus à leurs représentants (les RU) dans les instances qui participent à l'élaboration et à la gestion des politiques de santé. Cela implique également un statut nouveaux pour les associations d'usagers du système de santé.

La Loi HPST du 21 juillet 2009 : Elle donne encore plus de place aux RU dans la gouvernance des établissements de santé. Ils sont désormais associés à la mise en oeuvre des actions pour améliorer la qualité et la sécurité des soins. La parole, l'analyse des enquêtes de satisfaction, des réclamations sont autant de leviers à la disposition des RU pour améliorer la vie des personnes malades ou handicapées. Depuis la Loi HPST, les RU participent - de droit - aux Conseils de surveillance des établissements et siègent dans les différents Comités (CLIN, CLAN, CLUD...) qui organisent la vie des malades en établissement.

Source : CISS


Jusqu’au jour où le comité des patients a décidé de s’imposer. Au départ, ces malades du cancer sont intervenus sur des sujets qui peuvent sembler mineurs. Pour dire qu’il y avait un problème dans les chambres, trop bruyantes à cause du mistral qui souffle fort dans la région ; ou pour signaler des toilettes trop éloignés des chambres des malades.
« A chaque fois que nous avons alerté, cela a été corrigé, sans aucune opposition des médecins », affirme Jean-Louis Vidalenc. Autre victoire qui peut paraître anecdotique, mais qui a amélioré le quotidien des patients : la présence d’une viennoiserie au petit déjeuner.

La culture « patient » de l'IPC

Par la suite, ce comité, qui compte une douzaine de patients (plus une médecin et une personne du service « communication »), a pris de l’importance. Il a ainsi été consulté lors de l’ouverture d’une nouvelle unité d’hospitalisation pour les maladies du sang.
« Nous avons été associés sur les plans des travaux donc avant que les choses ne soient mises en route. On a fait les visites de chantier, etc. Pareil pour le nouveau bâtiment IPC 3 ».

Les patients notent les changements de mentalité dans l'établissement. « La culture de la maison depuis 2002, c’est que les patients existent », assure Jean-Louis Vidalenc. Ce dernier pense même que son comité est aujourd’hui plus efficace que les représentants des usagers qui siègent au conseil de surveillance.

Récemment, les autres membres de la commission ont mis leur veto à une initiative que la direction voyait comme positive. Pour améliorer les conditions d'accueil, elle envisageait d'afficher le nom des patients et leur temps d'attente sur un écran dans la salle d'attente. Ces patients ont jugé qu'elle était une atteinte à la confidentialité de leur prise en charge.

 

La démocratie sanitaire à l'épreuve du terrain : A Marseille, comment les patients se sont faits une place à l'Institut Paoli-Calmettes bit.ly/1TiD09i

Posté par Pourquoidocteur sur mardi 1 décembre 2015


Faire aussi de l'hôpital un lieu hospitalier  

Les patients interviennent sur de nombreux dossiers, parmi lesquels l’écriture des documents d’information remis aux patients. Et depuis octobre 2015, ils sont également associés au lancement d'un programme volontariste d’encouragement à l’autodéclaration des effets indésirables liés aux médicaments. Un sujet sur lequel il y a souvent une sous-déclaration par les patients.

Ecoutez...
Jean-Louis Vidalenc, membre du comité des patients de l’IPC : « Ces documents sont parfois totalement illisibles pour quelqu'un qui n'a pas de culture médicale ou juridique. Lorsqu'un passage nous paraît obscur on dit... »

 

Enfin, d’autres initiatives plus ludiques ont vu le jour grâce au comité des patients, comme un Ciné-club qui a récemment vu le jour dans l’établissement. Lors de projections en présence des malades, l’IPC reçoit même les réalisateurs de films (Robert Guédiguian, Patrice Leconte, Pascale Ferran, etc.). Le temps d'une soirée, cela permet aux malades d'oublier un peu leur pathologie.

Mais l'IPC ne compte pas s'arrêter là. Prochaine étape en faveur de la démocratie sanitaire, un débat public organisé le 28 janvier 2016. Il aura pour thème le coût et le financement des médicaments en cancérologie.

Parmi les six groupes représentant les acteurs concernés, un sera uniquement composé de patients ; deux autres seront formés par des représentants des usagers et des associations de patients. Une preuve de plus que l'Institut Paoli-Calmettes a désormais acquis la fameuse "culture patient".

(1) Dominique Maraninchi est un médecin cancérologue français, directeur général de l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) de février 2011 à août 2014

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