Ils ont pour mission de sauver des vies. Mais ces interventions périlleuses mettent le cœur des sapeurs-pompiers à rude épreuve. Une étude publiée dans Circulation montre que l’exposition à des températures extrêmes et la production d’efforts physiques violents pour combattre le feu augmente le risque de crise cardiaque chez les pompiers.
« Ces conditions très difficiles peuvent endommager le muscle cardiaque de pompiers en bonne santé, indique le Dr Nicholas Mills, cardiologue à l’université d’Edimbourg (Ecosse). Cela expliquerait le lien entre la lutte contre les incendies et le risque d’infarctus du myocarde ».
Les chercheurs écossais se sont penchés sur le sujet car la littérature scientifique, notamment américaine, rapporte - de manière surprenante - que les pathologies cardiovasculaires sont la principale cause de mortalité chez les soldats du feu. Une étude française menée par l’université de Bordeaux et Santé Publique France montre plutôt que ce sont les cancers qui tuent le plus de pompiers (45 %). Les pathologies de l’appareil circulatoire viennent en second (19 %). Jusqu’alors, aucune étude n’avait été menée dans notre pays sur le mortalité des pompiers.
Une température qui frôle les 400°C
Pour expliquer la prépondérance des maladies cardiaques, les chercheurs ont cité le stress psychologique intense et chronique auquel sont exposés les pompiers. Ils ont également évoqué l’exposition à des fumées toxiques contenant notamment du monoxyde de carbone et du cyanure, ou encore l’exposition à des conditions extrêmes lors de leurs interventions pour éteindre un incendie.
Et c’est cette hypothèse qu’ont souhaité étudier les chercheurs écossais. Pour cela, ils ont sélectionné 17 pompiers volontaires en bonne santé et non fumeurs. Ces derniers ont accepté de participer à deux simulations d’incendie au cours desquelles ils ont dû supporter une température pouvant grimper à 400 °C et tenter de sauver des victimes pesant en moyenne 79 kg.
Tout au long de ces expériences, et durant les 24 heures suivantes, les fonctions cardiaques des pompiers ont été enregistrées. « Les pompiers portaient des moniteurs enregistrant continuellement leurs fréquence et rythme cardiaques, ainsi que les impulsions électriques traversant le cœur de part et d’autre. Nous les avons ensuite analysés pour rechercher la preuve que le cœur fatigue, ce qui pourrait signifier un faible apport de sang au muscle cardiaque », décrit le Dr Mills.
Une profession à surveiller de près
A l’aide de ces données collectées, les cardiologues ont mis en évidence une augmentation du mécanisme de coagulation sanguine, ce qui favoriserait la formation de caillots dans les vaisseaux. Ils ont également observé une chute de la pression artérielle immédiatement après la simulation d’incendie. « Cette baisse de la tension est sûrement due à la déshydratation et l’augmentation de l’apport de sang au niveau de la peau pour aider le corps à se refroidir, explique le médecin écossais, ajoutant que plus cette perte d’eau est importante, notamment liée à une sudation excessive, plus le sang devient concentré en hémoglobine.
Dans un commentaire lui aussi publié dans Circulation, le Pr Stefanos Kales, de l’école de santé publique d’Harvard estime que ces résultats soulignent le besoin d’un suivi particulier des pompiers. « Cette étude devrait encourager les praticiens à évaluer et traiter sans attendre les pompiers présentant des risques cardiovasculaires, ainsi que prescrire des examens complémentaires, tels que des tests d’effort, des échographies cardiaques et des scanners des artères coronaires, afin de détecter une athérosclérose ou une hypertrophie cardiaque », écrit-il.
De leur côté, les cardiologues écossais suggèrent que les sportifs s’engageant dans un exercice physique en condition extrême prennent leurs précautions pour rester hydratés et prennent du temps après cet effort pour se reposer.