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Maladies rares

Maladies sans diagnostic : la clé est le séquençage génétique et son interprétation

Pour les maladies chroniques sans diagnostique, la réalisation d’un séquençage génétique au sein d’un réseau médical dédié permet le diagnostic dans 35% des cas. Mais il est possible d’aller plus loin.

Maladies sans diagnostic : la clé est le séquençage génétique et son interprétation metamorworks/istock




De nombreuses personnes atteintes de maladies chroniques rares ou inconnues restent sans diagnostic malgré des explorations médicales approfondies. En France, dans le meilleur des cas, l’errance diagnostique pour les maladies rares atteint 4 ans avant qu’une prise en charge sérieuse débute dans le cadre d’un Centre de Référence ou d’un Centre de Compétence. Mais certaines maladies restent sans diagnostic… parce qu’elles n’ont pas encore été décrites et qu’il n’existe pas de centre de référence.

Un réseau des « maladies sans diagnostic » (Undiagnosed Diseases Network ou UDN) a été mis en place il y a quelques années aux Etats-Unis par l’agence nationale de santé américaine (NIH) afin de répondre aux besoins des personnes atteintes de maladies non diagnostiquées, connues ou encore inconnues.

Une organisation performante

UDN est un réseau de 12 services hospitaliers, de deux centres de séquençage génétique et d'un centre de coordination, associé à un centre de stockage des prélèvements (Biobanque), un centre d’analyse des séquençages génétiques et un centre d’analyse du métabolome. Toute cette structure est accompagnée d’un portail Web pour favoriser la collaboration avec les malades et les médecins. L'objectif de ce réseau UDN est d'élargir l'accès des malades à une expertise multidisciplinaire et de tirer parti, pour le diagnostic de leur maladie, des avantages spécifiques du réseau collaboratif, tels qu’une expertise surspécialisée. L'évaluation diagnostique est fournie gratuitement aux patients. A ce jour, plus de 3000 personnes se sont portées candidates, plus de 1200 ont été acceptées dans le processus, presque 1000 ont été évaluées et 260 diagnostiquées. Une évaluation du fonctionnement de ce réseau UDN et du suivi des malades a été publiée dans le New England Journal of Medicine.

Des progrès constants

Depuis la publication du rapport initial UDN en 2012, le coût du séquençage du génome humain a considérablement diminué et les algorithmes d'analyse de ces données génétiques se sont également améliorés. Dans de nombreux centres médicaux universitaires aux États-Unis, le séquençage du génome fait désormais partie de la routine lors de l’exploration des patients atteints de maladies génétiques rares, ou présumées telles.

Cependant, de nombreux patients qui ont un séquençage du génome restent au final sans diagnostic et même chez les personnes qui ont un diagnostic possible, les données de confirmation clinique du diagnostic moléculaire, l’effet de ce diagnostic sur les soins médicaux et l’exploitation de ces résultats pour une compréhension de la maladie sont limitées. Les laboratoires impliqués dans ces séquençages n’ont en effet souvent pas accès aux informations de suivi. Le réseau UDN vise également à répondre à cette carence et il veut s’appuyer sur la collaboration entre les centres et le public pour y répondre.

Un diagnostic dans 35% des cas

L’évaluation présentée dans cet article porte sur les personnes sans diagnostic adressées à l'UDN sur une période de 20 mois (jusqu’en mai 2017). Ces personnes devaient être atteintes d'une maladie non diagnostiquée malgré des explorations approfondies réalisées par un médecin spécialisé.

Au total, 1519 patients (dont 53% de femmes) ont été adressées à l'UDN, dont 601 (40%) ont été acceptés pour évaluation. Parmi les personnes acceptées, 192 (32%) avaient déjà eu un séquençage de leur exome (la partie de l’ADN codant pour les protéines).

Les symptômes dont se plaignaient les malades étaient neurologiques dans 40% des cas, musculo-squelettiques dans 10% des cas, immunologiques dans 7% des cas, gastro-intestinaux dans 7% des cas et rhumatologiques dans 6% des cas.

Sur les 382 malades ayant eu une évaluation complète par le réseau UDN (clinique + séquençage génétique), 132 ont eu un diagnostic, ce qui donne un taux de diagnostic de 35%. Mais, il faut retenir que seulement 15 diagnostics (11%) ont été posés sur la seule analyse du dossier alors que 98 (74%) ont été obtenus grâce au séquençage de l'exome ou du génome complet.

Parmi les diagnostics, 21% ont donné lieu à des recommandations concernant des modifications de traitement, 37% à des modifications des tests diagnostiques et 36%, à un conseil génétique spécifique. Enfin, le réseau a permis de définir 31 nouveaux syndromes, inconnus jusqu’alors.

Le séquençage génétique est la clé

Ces résultats sont passionnants car il s’agit de malades souffrant depuis des années, qui avaient été multi-explorés et vus par de nombreux spécialistes.

Quand on analyse les résultats du réseau UDN, la première leçon est que, pour ces malades très difficiles, les médecins cliniciens-experts ne feront que 10% des diagnostiques et c’est le séquençage génétique qui permettra 90% des diagnostics. Le séquençage haut débit et l’analyse d’exome se concentrent sur les parties codantes du génome humain. Ils fournissent des informations sur les variations des 20 000 gènes répertoriés à ce jour dans le génome. Bien que l’exome ne représente que 1,5% du génome, il contiendrait 85 % des mutations responsables de maladies génétiques.

La France s’équipe de centres de séquençage génétique à haut débit grâce au Plan France Médecine Génomique 2025, lancé en 2016, mais il faut aussi utiliser des algorithmes performants pour permettre des diagnostics. En effet, dans l’étude du NEJM, ces diagnostics aboutissent réellement à des modifications non-négligeables des traitements, à un conseil génétique et ils permettent d’améliorer les tests diagnostiques pour les autres malades souffrant de la même maladie.

Il reste beaucoup de maladies à découvrir

La deuxième leçon est qu’il reste 65% des malades qui n’ont pas encore de diagnostic après ces procédures pourtant très performantes. Même si le réseau a décrit 31 nouveaux syndromes inconnus jusqu’alors, il reste donc encore beaucoup de travail. Si on veut décrire les autres syndromes encore inconnus afin de leur proposer un jour un traitement, il faut à l’évidence poursuivre et amplifier le réseau.

Nous avons mis en place en France des plateformes de séquençage génétique à haut débit, et un réseau de centres de référence pour les maladies rares, intégré dans un cadre européen. Mais pour les maladies sans diagnostic, le problème reste difficile même si différentes associations existent.

Une nécessaire collaboration internationale

S’il y a bien une chose où les américains sont très forts, c’est l’organisation. Peut-être serait-il envisageable, dans le cadre du prochain plan pour les maladies rares, d’établir des ponts avec le réseau américain UDN pour en faire un réseau international des maladies sans diagnostic. Il y a beaucoup de travail et la mise en commun des moyens et des données permettrait d’aller plus vite pour diagnostiquer ces 65% de malades sans diagnostic.

C’est un point capital car les techniques de réparation du génome (CRISPR-Cas9) ou de blocage des gènes anormaux (antisens) arrivent et leur utilisation en clinique humaine n’est probablement plus très éloignée.

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