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Parasites

Comment le parasite responsable du paludisme résiste à la chaleur de la fièvre

Des chercheurs américains ont découvert le mécanisme de défense du parasite du paludisme contre les assauts destructeurs de la fièvre. Des nouvelles pistes thérapeutique s'ouvrent à la recherche médicale.

Comment le parasite responsable du paludisme résiste à la chaleur de la fièvre Nedrofly/istock




L'ESSENTIEL
  • Des chercheurs américains ont compris que l'alliance de la molécule PI(3)P et de la protéine Hsp70 protège les intestins cellulaires du parasite contre la chaleur destructrice de la fièvre.
  • Briser ce duo permettrait d'éliminer les résistances aux médicaments antipaludéens déjà existant.

Le corps humain brûle de fièvre pour s'opposer au parasite du paludisme — aussi connu sous le nom de malaria — et pourtant celui-ci s'épanouit telle une salamandre dans les flammes. Comment fait-il pour contourner ainsi cette défense du système immunitaire ? Une équipe de recherche dépendante de l'université Duke (Caroline du Nord, États-Unis) assure avoir mis au jour ce mécanisme dans une étude publiée le 25 septembre dernier dans la revue eLife. Ils assurent avoir identifié un combo lipide-protéine qui protège les cellules du parasite contre le stress thermique de la fièvre. Un enjeu majeur puisque ce parasite unicellulaire plasmodium provoque 200 millions de cas de paludisme chaque année et tue 400 000 personnes tous les ans, essentiellement des enfants.

Concrètement, lorsque les parasites pénètrent la circulation sanguine d'une personne via la piqûre d'un moustique infecté, la température autour d'eux passe d'une vingtaine de degrés à 37°C. Face à cette intrusion, le système immunitaire va alors chercher à lutter contre ce parasite et la température corporelle peut alors monter jusqu'à 40,5°C ou plus avant de redescendre à la normale deux à six heures plus tard. Des poussées de fièvre qui se répètent tous les deux à trois jours. “C'est comme passer de l'eau à température ambiante à un bain à remous”, illustre Lu KuanYi, premier auteur de l'étude, ancien doctorant en génétique moléculaire et microbiologie dans le laboratoire de la professeure Emily Derbyshire à l'université Duke.

PI(3)P et Hsp70 : duo de choc (anti-thermique)

Le doctorant a étudié précisément la composition du parasite dans des globules rouges lors des changements de température, à l'aide d'un incubateur chauffé à 40,5°C et de la température ambiante. Avec ses collègues, ils ont observé que lorsque les températures montaient, le parasite produit davantage de phosphatidylinositol 3-phosphate (PI(3)P), une molécule lipidique. Cette substance s'accumule sur la paroi externe d'un minuscule sac à l'intérieur des cellules du parasite appelé vacuole alimentaire - l'intestin d'un organisme unicellulaire. Là, il enrôle et se lie à une autre molécule, la Hsp70 une protéine de choc thermique qui limite la déformation des autres protéines sous l'effet de la chaleur c'est-à-dire qu'elle les protège contre le stress thermique. La PI(3)P et Hsp70 renforcent alors les parois externes de la vacuole alimentaire. Sans leur union et forces conjointes, cet intestin parasitaire se percerait sous l'effet de la chaleur libérant ainsi son contenu acide dans le reste de la cellule parasitaire et pouvant ainsi tuer le parasite.

Des observations qui pourraient changer la façon de lutter contre le paludisme. D'autres études ont établi que les parasites du paludisme avec des niveaux de PI(3)P supérieurs à la normale sont plus résistants aux artémisinines, la principale classe d'antipaludiques. Or, depuis que ces artémisinines ont été commercialisées dans les années 70, une résistance partielle parasitaire se forme notamment dans certaines parties d'Asie du Sud-Est. Cette étude ouvre la voie à de nouvelles thérapies combinées pour le lutter contre le paludisme et notamment contre les cas résistants aux artémisinines. “S'il existe un autre moyen d'augmenter la perméabilité de la vacuole digestive, cela pourrait rendre la vacuole digestive à nouveau plus accessible à ces médicaments", se réjouit Lu KuanYi.

Les résultats suggèrent que la fièvre peut être un bon allié pour tuer le parasite et que par conséquent donner de l'ibuprofène à une personne souffrant de fièvre paludique n'est pas forcément une bonne chose surtout s'il est sous traitement artémisinine. “C'est parce que les artémisinines tuent les parasites du paludisme en endommageant les mécanismes de survie de leurs cellules, y compris les parties cellulaires qui produisent le PI(3)P", explique Emily Derbyshire professeure adjointe de chimie à l'université Duke. Or, les réducteurs de fièvre pourraient prolonger le temps nécessaire aux médicaments à base d'artémisinine pour tuer les parasites, comme l'ont suggéré certains rapports. Bien équilibrer l'effet des artémisinines avec la destruction de l'alliance PI(3)P et Hsp70 tout en contrôlant la fièvre nécessitera de nouvelles études mais lève un nouvel espoir.

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