Plus fortes, plus nombreuses… et plus mortelles. Les drogues du 21e siècle causent de sacrés dégâts, à en juger le dernier rapport annuel de l’Observatoire Européen des Drogues et des Toxicomanies (OEDT). L’agence note pour les années 2015-2016 une augmentation « préoccupante » des overdoses létales liées à la consommation de drogues en Europe, pour la troisième année consécutive.
Ainsi, dans les 28 Etats de l’UE, ainsi qu’en Turquie et en Norvège, 8 441 décès sont à déplorer en 2015, soit 6 % de plus que l’année précédente. Ces décès sont « principalement liés à l’héroïne et à d’autres opiacés », notent les rapporteurs.
Traitements de substitution
Cette hausse de la mortalité liée aux surdoses concerne « presque toutes les tranches d’âge ». Elle s’observe en particulier parmi les 1,3 million d’Européens considérés comme des « usagers problématiques d’opiacés », un groupe particulièrement « vulnérable ».
L’OEDT souligne que dans des pays comme la France, le Danemark, l’Irlande ou la Croatie, les surdoses d’opiacés utilisés dans des traitements de substitution (méthadone et buprénorphine notamment) tuent plus que l’héroïne. Il appelle donc les Etats à s’adapter pour lutter contre « le détournement de ces substances ».
Les NPS tuent plus
Plus globalement, l’Observatoire s’alarme de la recrudescence des NPS, les « nouveaux produits de synthèse », auxquels de plus en plus de jeunes sont exposés. Ces produits « représentent toujours un défi considérable pour la santé publique en Europe », d’autant plus qu’ils se renouvellent très rapidement – 66 nouvelles substances ont été détectées par l’UE en 2016. Ces drogues, dont la composition ne cesse de se modifier afin d’échapper aux réglementations des Etats, « ne sont pas assujetties aux mesures de contrôle international », déplore l’OEDT.
Or, leur « disponibilité globale reste élevée ». Les NPS s’acquièrent « sur des marchés en ligne ou illicites », à travers des ventes « de plus en plus clandestines ». En 2016, l’OEDT en surveillait 620, contre 350 en 2013. L’agence européenne s’inquiète notamment du danger que représentent des nouveaux opiacés de synthèse à forte teneur en principe actif, qui imitent les effets de l’héroïne et de la morphine, et constituent une « menace croissante pour la santé » en Europe et en Amérique du Nord.
Car si ces substances restent encore minoritaires sur le marché des drogues, elles ont une implication croissante dans « des intoxications, mortelles ou non ». Parmi ces substances figurent le fentanyl et ses dérivés, des sédatifs parfois plus puissants que l’héroïne, qui provoquent chaque année des overdoses par dizaines de milliers, notamment en Amérique du Nord. Selon le rapport, « plus de 50 décès associés à ces substances » ont déjà été signalés en Europe.
1 Européen sur 4 a consommé une drogue
Toutefois, au sein de l’espace européen, c’est le cannabis qui reste la drogue la plus consommée, devant la cocaïne, la MDMA (principe actif de l’ecstasy) et les amphétamines. Selon le rapport, la cocaïne est davantage consommée dans les pays de l’Ouest et du Sud, alors que les amphétamines le sont plus au Nord et à l’Est. Le nombre de saisies et la présence accrue de ses résidus dans les eaux usées semblent évoquer une augmentation de l’usage et de l’accès.
La drogue « reste un défi majeur pour les sociétés européennes », a commenté Dimitris Avramopoulos, commissaire européen pour la Migration, les Affaires intérieures et la Citoyenneté, cité en préambule du rapport. « Plus de 93 millions d’Européens », soit plus du quart des personnes âgées de 15 à 64 ans, « ont déjà consommé des drogues illicites », a-t-il encore souligné.