Appelée vulgairement la « chaude-pisse » ou la « chtouille », la gonorrhée est l’une des infections sexuellement transmissibles (IST) les plus répandues. Mais elle est aussi l’une des plus difficiles à traiter.
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) s’inquiète de l’augmentation des gonorrhées résistantes aux antibiotiques. Elle sonne l’alerte à l’occasion du congrès mondial sur les IST et le VIH organisé du 9 au 12 juillet à Rio de Janeiro (Brésil).
« La bactérie responsable de la gonorrhée est particulièrement intelligente, explique le Dr Teodora Wi, du Département Santé reproductive à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). A chaque fois que nous utilisons une nouvelle classe d’antibiotiques pour traiter l’infection, la bactérie évolue pour y résister ».
Résistante à l'antibiotique de dernier recours
Selon les estimations, quelque 78 millions de personnes contracteraient cette infection chaque année dans le monde, dont 4,7 millions en Europe. Un très grand nombre serait porteur d’une bactérie résistante aux anciens antibiotiques. Selon les données provenant de 77 pays, la quasi-totalité de ceux-ci enregistre une résistance à la ciprofloxacine, l’azithromycine.
Plus inquiétant, les données collectées entre 2009 et 2014 indiquent l’apparition d’une résistance aux médicaments de dernier recours, les céphalosporines à spectre large. Cette observation a poussé l’OMS à modifier ses recommandations de traitement en 2016.
Mais à en croire l’OMS, la progression de l’antibiorésistance pourrait être encore plus importante que prévu, car les cas sont surtout notifiés dans les pays à revenu élevé. Ils « ne représentent que la partie émergée de l’iceberg car les systèmes permettant de diagnostiquer et de notifier les infections incurables font défaut dans les pays à revenu faible où la gonorrhée est en réalité plus courante », souligne le Dr Wi.
Mieux détecter la maladie
A l’heure actuelle, il n’existe pas de test rapide pour diagnostiquer la gonorrhée ou de système capable de prédire quels antibiotiques seront efficaces contre cette infection. Résultat : les soignants traitent à l’aveugle des infections. Face à un écoulement urétral ou vaginal, ils prescrivent parfois à tort des antibiotiques contre la gonorrhée alors qu’il s’agit d’une autre infection. Un usage inapproprié qui favorise l’émergence de souches résistantes.
Pour lutter contre ce phénomène, l’OMS appelle les laboratoires à développer des tests rapides et précis pouvant être utilisés sur le lieu de soins. Des nouveaux antibiotiques sont aussi très attendus.
Actuellement, 3 médicaments-candidats sont en cours d’essai clinique. Un nombre relativement faible car les industriels se lancent peu dans la mise au point de nouvelles molécules. « Les traitements sont administrés uniquement pendant de courtes périodes et ils deviennent moins efficaces à mesure que la résistance se développe, ce qui signifie qu’il faut constamment reconstituer le stock de nouveaux médicaments », décrit l’OMS. « À plus long terme, il nous faudra un vaccin pour prévenir la gonorrhée », ajoute le Dr Marc Sprenger, directeur du Département Résistance aux antimicrobiens de l’OMS.
En attendant, la prévention semble être la meilleure arme pour éviter de nouvelles infections et pour enrayer la diffusion de ces souches bactériennes multirésistantes. L’usage correct et régulier du préservatif est le moyen le plus simple et le plus efficace. Or, le recul de son utilisation explique, en partie, l’essor des gonorrhées résistantes.
Un effort d’information et de sensibilisation sur cette maladie mais aussi les autres IST s’avère indispensable pour pousser les populations à consulter un médecin.