Six mois après avoir présenté 12 mesures pour revaloriser la psychiatrie, "parent pauvre de la médecine" dont elle souhaitait "faire évoluer le modèle de financement", la ministre des Solidarités et de la Santé poursuit son travail pour une meilleure prise en charge de la santé mentale.
Jeudi 28 juin, Agnès Buzyn a présenté sa feuille de route "Santé mentale et psychiatrie". Axée sur les bonnes pratiques et la prévention, elle vise à diagnostiquer de manière plus précoce les patients atteints de troubles psychiques et améliorer leur prise en charge. Avec un objectif à peine voilé : réduire l’impact économique et sanitaire des problèmes de santé mentale.
Le poids de la santé mentale
Car il y a urgence. Selon le nouveau rapport annuel de l’Assurance maladie, les dépenses de santé recouvrant les troubles psychiques et psychiatriques se sont élevées à 23 milliards d’euros en 2016, et se placent ainsi en 2e position derrière l’hospitalisation ponctuelle, devant les cancers et les maladies cardio-vasculaires. En l’espace de 5 ans, ces dépenses affichent une augmentation de 1,7 milliard d’euros. En cause : le vieillissement de la population, mais aussi un système de diagnostic plus performant, qui ont fait bondir les dépenses de l’Assurance maladie liées à la santé mentale.
Représentant 14% des dépenses totales de l’Assurance maladie en France, les soins psychiatriques concernent à l’heure actuelle 7 millions de Français : 2,1 millions souffrent de problèmes psychiatriques, tandis que 7 millions reçoivent un traitement psychotrope chronique.
Prévenir et promouvoir le bien être mental
Mieux prévenir l’apparition de troubles psychiatriques en favorisant le bien-être mental : tel est le premier axe de la feuille de route présentée par Agnès Buzyn, qui souhaite "repérer précocement la souffrance et les troubles psychiques et prévenir le suicide". Parmi les mesures évoquées, celle concernant les jeunes, particulièrement vulnérables, puisque 80% des troubles se déclarent entre 15 et 20 ans. Le ministère des Solidarités et de la Santé prévoit de lancer dans trois régions Ecout’Emoi, une expérimentation qui permettra d’adresser des jeunes de 11 à 25 ans vers des consultations de psychologues prises en charge par l’assurance maladie, après une évaluation par les médecins généralistes.
Parallèlement, un plan d’ensemble contre le risque suicidaire sera déployé sur tout le territoire, sous le pilotage des Agences Régionales de Santé, notamment le dispositif VigilanS de recontact systématique des personnes ayant fait une tentative de suicide. Des actions de prévention de la souffrance au travail seront mises en place, notamment pour les professionnels de santé et médico-sociaux. Enfin des actions de sensibilisation ou de formation des médecins, des médias, des usagers des services de santé mentale et de la population générale contribueront à déstigmatiser ces maladies et les personnes touchées.
Des parcours de soins coordonnés
Autre axe affirmé par la feuille de route : "Garantir des parcours de soins coordonnés et soutenus par une offre en psychiatrie accessible, diversifiée et de qualité". Parmi les mesures envisagées, celle d’ouvrir un stage en santé mentale pendant les études de médecine et de former davantage de professionnels afin de "favoriser le repérage des troubles et l’accès aux soins de santé mentale le plus tôt possible". Autres pistes évoquées : le développement de la prise en charge ambulatoire afin d’offrir aux patients une continuité de suivi tout au long du parcours et la télémédecine pour les populations fragiles et les zones sous denses.
Favoriser l’autonomie
Dans un troisième temps, Agnès Buzyn souhaite "améliorer les conditions de vie et d’inclusion sociale et la citoyenneté des personnes en situation de handicap psychique". Pour cela, la feuille de route propose de leur faire bénéficier du dispositif d’emploi accompagné qui prévoit un accompagnement médico-social et un soutien à l’insertion professionnelle. L’accès et le maintien des personnes dans un logement autonome ou accompagné est aussi au cœur de ce troisième axe. Aussi, la feuille de route prévoit l’extension du dispositif "Un chez soi d’abord". "Expérimenté pour les personnes à la rue ayant des troubles psychiques graves et persistants", ce dernier doit passer de 4 sites actuellement à 16 autres d’ici à 2021, affirme le communiqué de presse du ministère des Solidarités et de la Santé.