Des scientifiques des universités de Berne et de Fribourg (Suisse) ont peut-être mis le doigt sur une question vieille comme le monde: pourquoi nous rappelons-nous de certains rêves et pas d’autres. L'équipe de recherche a pour la première fois identifié les neurones papillaires à noyau comme étant responsables des mouvements oculaires rapides pendant le sommeil. Le fruit de leur recherche a été publié dans la revue Nature Communications.
Le mouvement oculaire rapide des yeux dans le sommeil paradoxal est présent lors d’une phase de forte activité de rêve. Cette phase du sommeil est appelée paradoxale en raison du relâchement musculaire de la personne endormie associé à des mouvements rapides des yeux. Si cette phase du sommeil a été découverte par des chercheurs français et américains dans les années 1950, à ce jour, la compréhension de l'utilité de cet étrange phénomène reste limitée. D’après les scientifiques, le mouvement oculaire rapide accompagnerait le travail de mémorisation d’information qui s’effectue pendant le sommeil paradoxal, et expliquerait en partie pourquoi nous nous souvenons de certaines informations à notre réveil.
Influer sur les mouvements oculaires pendant le sommeil
Le Nucleus Papilio — une structure située dans le tronc cérébral, appelée ainsi car elle rappelle les ailes d’un papillon —, a été étudié par l'équipe dirigée par Franck Girard et Marco Celio, de l'université de Fribourg. Franck Girard explique sa démarche : “Ces neurones sont associés à de multiples centres nerveux, notamment ceux responsables des mouvements oculaires et ceux impliqués dans le contrôle du sommeil. Nous nous sommes donc posé la question suivante : les Nucleus Papilio peuvent-ils jouer un rôle dans le contrôle des mouvements oculaires pendant le sommeil ?”
Après avoir posé l'hypothèse, l'équipe de chercheurs fribourgeoise a travaillé la docteure Carolina Gutierrez Herrera, du département de neurologie de l'hôpital universitaire de Berne, et le professeur Antoine Adamantidis, du département de recherche biomédicale de l'université de Berne, qui étudiait le sommeil chez les souris.
Varier l’intensité du mouvement oculaire rapide
Carolina Gutierrez Herrera avait constaté dans ses recherches que les neurones du Nucleus Papilio étaient particulièrement actifs dans la phase du sommeil paradoxal, ce qui a permis aux chercheurs de l'université de Berne d'observer de plus près la boucle autour des neurones du Nucleus Papilio. Ce faisant, les chercheurs ont utilisé des méthodes optogénétiques (techniques optiques et génétiques combinées) pour démontrer que leur activation artificielle provoque des mouvements oculaires rapides, en particulier pendant cette phase du sommeil. Ils ont également constaté que l'inhibition ou l'élimination de ces mêmes neurones bloque le mouvement des yeux.
Les chercheurs concentrent maintenant leur attention sur la confirmation des effets de l'activation des neurones du Nucleo Papilio pendant le sommeil paradoxal chez les humains.
Dans leur conclusion, les chercheurs affirment que l'identification des neurones à noyau Papilio responsables du sommeil paradoxal pourrait bientôt aider les scientifiques à mieux comprendre les circuits neuronaux impliqués dans le sommeil paradoxal. Cette découverte aiderait également à comprendre comment ces neurones sont sujets à des changements dégénératifs dans des affections telles que la maladie de Parkinson.