- De nombreuses personnes sont immunisés contre le Sars-CoV-2 grâce à des anticorps développés contre d'autres bactéries, c'est l'immunité croisée.
- Plusieurs chercheurs estiment que la part de l'immunité collective nécessaire pour stopper l'épidémie se situe entre 10 et 20%.
- Les prochaines semaines seront des indicateurs pour savoir si une deuxième vague se profile.
Les efforts du confinement continuent de se faire sentir. Le nombre de malades hospitalisés pour une infection sévère au Covid-19 dans les services de réanimation est de 1 700, un chiffre “toujours en diminution depuis le 8 avril”, a noté l'agence sanitaire Santé publique France dans son bulletin du 21 mai. Au plus fort de l’épidémie, ce sont 7 148 malades qui occupaient les services de réanimation. Le nombre de décès continue lui aussi de diminuer avec 74 morts dans les hôpitaux entre le 21 et le 22 mai dernier, relève Franceinfo.
L’immunité croisée
Une immunité collective pourrait être atteinte plus vite que prévu grâce à l’immunité croisée. Lorsqu’une personne guérit d’une infection, elle développe généralement des anticorps spécifiques contre cet agent infectieux. Parfois, ces anticorps peuvent lutter contre des bactéries ou des virus d'espèces proches. C’est ce qu’on appelle l’immunité croisée. Dans le cas du coronavirus, nombreux sont ceux qui ont ainsi développé une protection contre le Sars-CoV-2 par une infection passée à d'autres coronavirus causant de banals rhumes. Des chercheurs américains ont publié une étude dans la revue Cell, chiffrant entre 40 et 60% la part de la population immunisée contre le Covid-19 par ce principe d’immunité croisée.
Pour Yonathan Freud, urgentiste à l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière, il n’y aura pas de deuxième vague, justement grâce à ce principe de l’immunité croisée. “Je comprends qu'on soit très frileux à l'idée de faire une nouvelle prophétie, car tout le monde s'est tellement planté au départ, et moi le premier”, a-t-il avancé sur son compte Twitter. Il s’appuie sur la baisse drastique du nombre de contaminations chez ses collègues par rapport au début de l’épidémie pour expliquer pourquoi il n’y aura pas de deuxième vague.
Pourquoi je pense qu'il n'y aura pas de 2eme vague, ou en tout cas que l'épidémie actuelle est terminée. Je vais essayer de détailler. C'est ma conviction, mais si elle ne vous plait pas rien ne vous oblige à lire ou à commenter on ne débattra pas ici.
— Yonathan Freund (@yonatman) May 21, 2020
10 à 20% d’immunité collective nécessaire
Certains chercheurs estiment que l’immunité collective nécessaire pour stopper l’épidémie ne serait pas 60% de la population mais se situerait plutôt entre 10 et 20%. L'une des conséquences de l’immunité croisée est une hétérogénéité dans la propagation du virus. Cela explique que certaines personnes sont plus vulnérables face au Covid-19 et davantage des vecteurs de transmission du virus. “Dans l'urgence, on fait souvent au plus simple (...). Mais plus l'épidémie dure, plus on a le temps d'affiner nos calculs et d'incorporer les différentes sources d'hétérogénéité dans nos modèles”, décrit Gabriela Gomes, une mathématicienne de Liverpool (Royaume-Uni), à Mediapart. Dans une pré-publication dans la revue BMJ, qui doit encore être évaluée par d’autres chercheurs, elle arrive à la conclusion que l’immunité collective se situe entre 10 et 20%. “Nous obtenons un résultat similaire de notre côté, avec un seuil autour de 14% dès lors que nous tenons compte de ces fortes hétérogénéités”, confirme à Laurent Hébert-Dufresne, chercheur à la University of Vermont’s Complex Systems Center, dans plusieurs publications.
Malgré la possibilité d’avoir une sortie de l’épidémie plus tôt que prévu, l’heure reste à la prudence. “Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'aujourd'hui, on n'a pas de signal d'alerte. Mais il est trop tôt pour tirer de ce constat que tout va aller bien”, résume à l'AFP l'épidémiologiste Daniel Lévy-Bruhl, responsable de l'unité des infections respiratoires au sein de Santé publique France. Les chiffres sur les baisses du nombre de décès et de personnes en réanimation sont en cours ceux qui résultent de l’effort de confinement. “Peut-être que la semaine prochaine, on aura des éléments”, poursuit-il. Par ailleurs, il juge “prématuré de fonder un espoir sur une immunité croisée” qui ne fait pas l’unanimité, selon lui.