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QUESTION D'ACTU

Nouveau scandale sanitaire ?

L'Androcur, ce traitement contraceptif qui multiplie les risques de tumeur au cerveau

Prescrit depuis les années 80 comme contraceptif ou traitement contre l’acné, l’Androcur présenterait des risques sérieux pour la santé en cas d'utilisation prolongée. L’ANSM vient de créer un comité scientifique afin de réviser les recommandations relatives à sa prescription.

L'Androcur, ce traitement contraceptif qui multiplie les risques de tumeur au cerveau Dr_Microbe /iStock




Nouveau scandale sanitaire en vue. Après les pilules de 3e et de 4e génération, le Médiator ou le Dépakine, c’est au tour de l’Androcur de faire l’objet d’une nouvelle crise du médicament.

Commercialisé depuis les années 80 par les laboratoires Bayer, ce progestatif prescrit pendant des années à des milliers de femmes est aujourd’hui accusé d’augmenter fortement le risque de méningiome, une tumeur cérébrale généralement bénigne mais qui peut occasionner de graves séquelles comme des troubles de la mémoire, de l’épilepsie ou une perte du goût et de l’odorat.

Un risque multiplié par 20

Appartenant à la classe des antiandrogènes stéroïdiens, l’Androcur est notamment utilisé pour traiter le cancer de la prostate à un niveau avancé. Mais ce n’est pas son seul usage. Contenant un principe actif appelé acétate de cyprotérone, l’Androcur et ses génériques bloquent les effets de la testostérone et sont régulièrement prescrits aux femmes souffrant d’hirsutisme, un développement extrême de la pilosité, contre l’acné, l’endométriose ou en guise de contraception. Pourtant, révèle L’Express, l’Androcur n’a jamais reçu d’autorisation de mise sur le marché pour ces trois indications.

Prescrit à 80% des femmes (57 000 en 2017, selon l’Assurance maladie), l’Androcur est aujourd’hui soupçonné de multiplier par 7 à 20 le risque de méningiome selon la durée du traitement. Sur son site Internet, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) reconnaît que depuis 2009, "l’acétate de cyprotérone fait l’objet d’une surveillance particulière suite au signal émis par la France au niveau européen sur le risque d’apparition de méningiome. L’évaluation de ce signal par l’Agence européenne des médicaments (EMA) a conduit à faire figurer ce risque dans la notice du médicament en 2011".

Selon une nouvelle étude pharmaco-épidémiologique menée par l’Assurance maladie en collaboration avec le service de neurochirurgie de Lariboisière, le risque de méningiome est multiplié par 7 pour les femmes traitées par de fortes doses sur une longue période (plus de 6 mois) et par 20 après 5 années de traitement. Des chiffres qui seraient largement sous-estimés, explique à L’Express le Dr Isabelle Yoldjian, cheffe de pôle des médicaments en endocrinologie à l'ANSM. "Ces chiffres reposent sur l'analyse des seuls cas opérés. Or les médecins ne retirent pas toujours les tumeurs, car elles régressent souvent spontanément après l'arrêt du traitement. Et certaines peuvent aussi passer longtemps inaperçues."

Parmi les patientes concernées par les effets secondaires de l’Androcur, L’Express rapporte le cas de Marlène Vault, une Rennaise de 39 ans qui, en décembre dernier, s'est rendue aux urgences après avoir eu soudainement des difficultés à parler. Une IRM a confirmé la présence d’une tumeur de 5 centimètres sur 9. "Le neurochirurgien a aussitôt fait le lien avec l'Androcur, que je prenais depuis 2005", raconte-t-elle. Opérée, elle souffre aujourd’hui d’épilepsie et de troubles de la mémoire, ne peut plus conduire et ne travaille plus. Sur le groupe Facebook qu’elle a créé et qu’elle anime, une demi-douzaine de patientes victimes l’ont contactée en quelques jours. Il compte aujourd'hui 57 membres. 

Un avertissement émis depuis 2008

Marlène Vault et les femmes qui ont rejoint le groupe Facebook qu’elle a créé sont loin d’être les seules concernées. Selon l’étude de l’Assurance maladie, plus de 500 femmes prenant de l'Androcur ou un de ses génériques ont subi une intervention pour un méningiome entre 2007 et 2015.

Le scandale risque d’être d’autant plus important que les risques concernant le médicament sont connus depuis 2008. C’est un neuro-chirurgien qui a donné l’alerte. "J'ai commencé à me poser des questions le jour où j'ai vu en consultation deux patientes sous Androcur atteintes de méningiomes multiples, dont l'une était sur le point de devenir aveugle", explique le Pr Sébastien Froelich, de l’hôpital Lariboisière à Paris.

D’où la surveillance particulière dont fait l’objet l’Androcur depuis 2009 par l’EMA et la figuration de ce risque sur la notice du médicament. La question est donc aujourd’hui de savoir pourquoi il a continué à être prescrit à des patientes sur le long terme.

Alors que le scandale sanitaire entourant l’Androcur n’en est qu’à ses débuts, un rapport a été remis lundi dernier à Agnès Buzyn. Celui-ci souligne des "dysfonctionnements possibles en matière d’information et de communication" et pointe une "absence d’accompagnement" des patients.

De son côté, l’ANSM a créé au mois de juin "un comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) qui a pour objectif de discuter des conditions d’utilisation et de prescription de ces médicaments afin de limiter ce risque". De nouvelles recommandations élaborées avec les professionnels de santé devraient être émises "d’ici la fin de l’année".

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